Un Coup d’Etat

"L’Objection de Conscience en Israël est de justement faire l’Armée."

André Darmon

Israël serait-il devenu le pays de tous les chantages, de tous les mensonges. J’ai du mal à reconnaître ce pays que j’ai découvert, jeune lycéen, dans les années 70-72. Ce pays, dont l’emblème était l’Orange de Jaffa ressemble bien plus aujourd’hui à ‘’Orange mécanique’’. Cela fait des mois, des années, que je tire désespérément la sonnette d’alarme quant aux fractures qui frappent notre société, notre communauté francophone et la communauté juive dans son ensemble. Le patron d’une télévision francophone ne m-at-il pas surnommé presque ‘amicalement’ le ‘paranoïaque de droite’ quand je n’hésitais pas, et dans ces colonnes comme dans toutes les radios et télés qui m’invitent, à affirmer avant tout la défense du Judaïsme et de la Judéité dans ce pays, (moi qui ne suis pas religieux) et la sauvegarde de vraies frontières juives. J’assume. Un général, patron des blindés de Tsahal, m’avait affirmé après la Deuxième guerre du Liban que nos pilotes de l’armée de l’air avaient tout simplement ‘’le nez en l’air’’, au sens propre comme au sens figuré. Je comprends mieux cette affirmation aujourd’hui quand beaucoup d’entre eux menaçaient le pays de manière hautaine, non pas d’objection de conscience mais d’objection politique de conscience. Comme quoi, ni la honte ni la mémoire n’étouffent la conscience des imbéciles. Le Premier ministre, Benjamin Netanyahou a eu, par ailleurs, parfaitement raison, quand il a accusé Yoav Gallant, son ministre de la Défense (et démis des ses fonctions, provisoirement ? ) pour ne pas avoir immédiatement tordu le cou à cette pseudo-rébellion initiée entre en autres par Dan Halouts, le pilote devenu le chef d’Etat major défaillant de cette Deuxième guerre du Liban. Un Yoav Gallant, qui a dû subir le même vertige traumatique qu’Itshak Rabin à la veille de la Guerre des Six Jours, la peur abyssale d’être celui par lequel surviendrait la perte du pays. Ce en quoi il pourrait peut-être être pardonné. Je ne rentrerais pas dans le détail de tous les scandales, chantages et menaces larvées de Guerre civile ou de Coup d’Etat militaire, mais celui des pilotes est emblématique mais aussi pathétique. L’on sait qu’un avion ne peut absolument pas décoller sans la présence, la technique et le dévouement de ses mécaniciens, des mécaniciens qui eux aussi ont menacé de débrayer, si les pilotes réservistes ne revenaient pas à la raison. Ces mécaniciens qui appartiennent à cet Israël Hachnia », ce deuxième Israël, tant marginalisé et parfois invisible, ont bien fait comprendre à l’armée que ce sont les techniciens qui font tourner la boutique et les moteurs. Des techniciens d’avion, mais aussi de chars, de corvettes, de voitures, qui viennent principalement de la périphérie, de ces banlieues pour lesquelles il est impossible de payer des années d’étude à 40.000 shekels chaque année, pour accéder à des emplois supérieurs. Je voudrais rappeler à nos lecteurs, et cela concerne, bien évidemment, l’Iran et la Syrie, que 75% des attaques contre ces pays et leurs complexes d’usines d’armement militaires, leurs centrales nucléaires et technologiques se font au moyen de drones d’attaques.

Des pilotes Israéliens au « nez en l’air »
Cela veut dire et bien que la présence de pilotes soit, de toute façon, indispensable, elle en viendra à diminuer avec le temps, comme son influence. Les réservistes récalcitrants en viendront à être mis plus rapidement à la retraite, quand les cimetières israéliens sont déjà bien remplis d’indispensables officiers, d’incontournables banquiers, de gens sophistiqués de la High-tech, en somme de personnes qui se croyaient incontournables, mais qui finissent tous au même endroit. Il faudra, par ailleurs, que Ron Huldai, le très controversé maire (qui se voyait Premier ministre il y a un an) m’explique pourquoi la Grande piscine municipale de Tel-Aviv était fermée le jour de la Grande grève. J’ai pensé, perfidement, que la réforme judiciaire pourrait très certainement polluer le chlore des trois bassins, ou endommager les installations sportives du centre. Chacun avec son petit et dérisoire pouvoir a tenté de montrer qu’il pouvait enrayer la machine et dérober au peuple, le résultat des urnes.

Elections ?
Sommes-nous à la veille d’un bouleversement aussi bien social que politique ? Notre confrère Amit Segal pense que nous sommes déjà entrés dans une autre année électorale (bis repetita). Les Gallant, Edelstein et d’autres encore, feront, selon lui, à Netanyahou ce que Edith Cilman et Amihaï Chikli avaient fait à Bennet ou pour remonter un peu plus dans le temps, ce que Benny Begin avait fait en 1999 à Netanyahou, offrant un pouvoir temporaire à Ehoud Barak, devenu en ces temps incertains, l’agitateur professionnel numéro 1. Pour ma part, et c’est l’idée d’Arié Déry, la solution consisterait à intégrer à nouveau Benny Gantz dans le gouvernement, mais à quel prix? qui à la faveur de la crise actuelle, semble grimper dans les sondages et supplanter l’aboyeur national, j’ai cité Yaïr Lapid. De nouvelles élections nous montreraient que certaines fractions du Likoud abandonneraient le navire, ceux qui n’auraient pas admis le retrait ou le ralentissement de la législation de la réforme judiciaire, d’autres le feraient aussi, ceux qui n’auraient pas admis, au contraire, la cadence législative infernale et le foutoir qui s’en est suivi. Une troisième partie estimerait que Bibi pourrait aller savourer une retraite méritée et que le changement à la tête du Likoud était devenu inéluctable, malgré ses succès électoraux quasiment ininterrompus. Allons-nous ou pas, une fois encore, vers une crise politique ? Ou bien nous faudra-t-íl, dès la session d’été de la Knesset, se pencher sérieusement pour modifier le mode d’élection de nos députés, plutôt que celui de nos juges pour assumer une indispensable stabilité que l’on croyait pourtant avoir atteinte avec 64 députés. Bienvenue à nouveau à Disneyland.
Je profite de ce nouveau numéro pour vous souhaiter avec toutes nos équipes, de Bonnes fêtes de Pessah. Le prochain magazine sortira à la fin de la première semaine de mai à cause du Jour du Souvenir Yom Hazikarone des soldats disparus, de Yom Haatsmaout mais aussi à cause de la sortie du film documentaire que je prépare depuis 8 mois et auquel je pensais depuis plus de 15 ans. Il sera diffusé gracieusement sur Israelmagazinenews tv. 

ANDRE DARMON