Y A-T-IL UN PILOTE DANS L’AVION ?

"Ceux qui croient que le pouvoir est amusant, confondent "pouvoir" et "abus de pouvoir"."

André Malraux

Pourrions-nous imaginer Emmanuel Macron quitter un jour le palais de l’Elysée pour s’installer sur les berges du Touquet, ou voir Joe Biden abandonner la Maison Blanche pour s’établir à Chicago tandis que Boris Johnson, laissant derrière lui Downing Street, irait gouverner la Grande Bretagne depuis un petit patelin d’Ecosse ou d’Irlande ? Non bien sûr, c’est ce qu’a pourtant fait Naftali Bennett en transposant scandaleusement le palais du Premier ministre, de Jérusalem, la ville sainte, à Raanana, la ville des dentistes, et tout cela dans sa propre villa. Et je n’ai rien contre les dentistes, pas même une dent ! Nous n’avons pas bataillé pendant des décennies pour faire reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël et y accueillir des ambassades pour que le premier Premier ministre religieux, désigné, pas élu, lâche illégalement Jérusalem. Illégalement, car les bureaux du Premier ministre, comme les ministères ou la Knesset, doivent obligatoirement élire domicile à Jérusalem, selon la loi fondamentale du pays. Par ailleurs, tous mes confrères, même ceux de gauche, ne comprennent pas pourquoi Bennet, lui-même, a fait engager pour cela, près de 50 millions de shekels de construction et rénovation, sécuritaire, affirme-t-il sans rire, et de plus sans aucune autorisation urbaine. D’autant que depuis le début de son mandat ses jours de gouvernance sont comptés. Aussi, 50 millions de shekels, pour rien ! Quand je vois que l’on reprochait des cadeaux, des cigarettes et du champagne à son prédécesseur, je suis pris, quelque peu, de nausée. Sans compter, oui effectivement sans compter, que ce Premier ministre d’opérette fait payer en plus aux contribuables les frais de bouche de sa famille. Chers lecteurs, ce ne sont pas des rumeurs, ce n’est pas de la médisance, ce sont des faits. Tout cela au moment où le pays souffre durement (mis à part une certaine élite) de la flambée des prix, de la hausse vertigineuse de l’immobilier, du carcan des monopoles. J’ai suivi avec application ces dernières années le travail des différents ministres de l’Economie et des Finances (je ne parle pas, bien sûr, de Libermann, l’homme qui a lâché petites et moyennes entreprises et les indépendants) et je les ais vus se battre contre ces monopoles, des hydres à qui l’on coupait une tête pendant qu’une autre tête repoussait. J’en suis arrivé à la conclusion suivante et simple. Il faut que nous, consommateurs, citoyens, arrêtions d’acheter tout et n’importe quoi et à n’importe quel prix. J’ai une amie qui achète le journal tous les matins et bien que la langue hébraïque lui soit encore parfois obscure, un prix restant un prix, un produit restant un produit, elle n’achète qu’en promotion.
Mais pour notre grand malheur, c’est ce que nous avons fait il y a un an ; acheter en promotion de nouveaux gouvernants, qui nous proposaient une jolie et alléchante étiquette aux couleurs bleu blanc teintées de Judaïsme souverain. Aussi , que l’on se trouve dans les magasins pour acheter ou devant une urne pour voter, il nous faudra désormais nous méfier des étiquettes racoleuses, et se décider résolument pour ce que l’on connait et pour ce qui a déjà fait ses preuves. Car selon nombre de confrères, de nouvelles élections ne tarderont pas. Y-a-t-il un pilote dans l’avion, écrivais-je en première page. Je crains qu’au rythme où nous encaissons les erreurs sécuritaires, sociales, économiques, que cet avion ne s’abîme bientôt en mer.

ANDRE DARMON